Lundi 1er Décembre
La deuxième équipe à son tour quitte le chalet pour faire son raid. Lever à 8 heures. Nous nous occupons l'après-midi à ranger le chalet. Repos. Avice, pour saluer la cuisine de St Guérin compose un quatrain : Les forêts où rugit le vent Paussalemont Les neiges, les rochers et le ciel et l'abîme L'ont vu, la hache au poing courant de cîme en cîme … ainsi vers ses (?) courait Agamemnon. Et les arbres s'étonnent et frémissent tout bas D'avoir vu sa massue voler de branche en branche Et sa cognée s'abattre au flanc des séquoias Déterrant les rochers, roulant des avalanches Soudain plus aucun bruit, l'obscurité s'étend Et le vent de la nuit s'avance en chantonnant Une chanson bien douce. Le bon géant Cazet Dont le cœur est de roc et l'âme inébranlable Rentre pose ses outils s'approche de la table Et se met à pleurer ------------------------- On lui sert des navet (*) Après cet effort Avice s'est reposé pendant 8 jours. (*) l'auteur se permet de faire remarquer à l'auteur de ces lignes que cette ortographe est d'un optimisme que rien ne justifie. Mardi 2 Décembre Le bois rentre tout doucement vers le chalet. Le chef nous fait marcher au pas cadencé en vue du rassemblement de jeudi. Notre nouveau moniteur arrive au chalet. Au drapeau, il nous est présenté. R.A.S. Mercredi 3 Décembre Le bois d'en bas est entièrement au chalet, c'est un succès. Le temps est tellement beau que tous nous travaillons torse nu. Weller et Pfeiffer font connaissance avec l'eau du torrent. Agréable dirait Fouchère. La deuxième équipe rentre enchantée et crevée. ![]() Jeudi 4 Décembre Rassemblement du Centre Patureau-Mirand aux Curtillets. But : nous faire mieux connaître notre patron. Laïus du chef Testot-Ferry. Déjeuner sur l'herbe, on met sur pied un dégagement pour le 21 et le 28. Beaucoup d'entre nous retrouvent dans d'autres groupes d'anciens amis, on renoue. Remontée à St Guérin après un arrêt sympathique à Beaufort. Vendredi 5 Décembre La 1ère équipe est désignée pour aller soutenir de la vigueur de son travail les volontaires de Roselend, les mines ne sont pas gaies. Le bois continue à descendre le câble avec rapidité. Rien à signaler sauf le départ du tenant de ces lignes pour une permission. Le seul de la première équipe qui arbore une face hilare. Samedi 6 décembre Départ de la 1ère équipe pour Roselend, conduite par Monsieur le Chef de Patrouille, à titre officieux, Honilh. Nous gravissons le col du Pré, "mollo, mollo", bien entendu. Le bon ami Vallat conduit la caravane à une allure de dératé. Peut-être ignore-t-il à quel désert il la mène ! Vue splendide sur le Mont Blanc où danse un petit chapeau de brouillard. Nous descendons sur Roselend cependant que Barbier évoque, en termes émus, les diverses péripéties d'une vie antérieure et mouvementée que les détours du chemin sortent peu à peu de l'oubli. Froid de canard, un petit vent ralleur caresse les échines. Voici le chef Hubat -et son discours peut-être d'autant plus grotesque qu'il voudrait être plus aimable- "Vous êtes ici, dit-il, pour 8 ou 15 jours... peut-être plus". Bertrand remet les choses au point d'un ton définitif. Sur ce, nous gagnons la piaule où nous attendent des paddocks squelettiques dans quelques mètres cube d'air qu'un poêle stupide rend irrespirable. Le dîner ajoute sa note à cet accord harmonieux. Réfectoire glacé, cœurs aussi. Les chefs briftent à part dans une attitude solennelle et compassée. Les volontaires, totalement ankylosés et quasiment muets, sont fichés dans leurs anoraks, comme autant de pingouins raidis par la froidure. Nous rentrons sous les étoiles et demandons à notre fatigue un sommeil auquel nos paillasses semblent ne pas nous convier (pour tout détail complémentaire, s'adresser au chef Desrobert). Aucune organisation ; ce qui est pire : aucun esprit d'équipe. Dieu !... qu'il fait bon dormir à St Guérin ! Dimanche 7 Décembre Peu de choses à raconter, le mérite de la journée est de n'être qu'éphémère et de nous rapprocher de la petite quille. Chacun vaque à son ennui personnel. La neige ajoute bientôt sa note mélancolique, elle tombe drue, poussée par le vent. La cuisine est plus que jamais anémique : Monsieur le Chef de patouille Honilh à titre officieux marque son amertume par quelques phrases bien senties. Le soir l'équipe se partage : les uns vont chez Duret et les autres chez Marie-Rose, différence d'ailleurs apparente car nous nous rencontrons tous pour noyer notre nostalgie dans des gratinés plantureux. Il neige toujours, et maintenant la boue rentre dans la chambrée... et croise la fumée qui fait des manières pour ne pas en sortir. "A St Guérin... ce n'est pas comme à St Guérin... Si tu étais à St Guérin...". La litanie se déroule et s'achève dans un chœur sonore et révélateur. Aurions-nous par hasard oublié de révéler que Messieurs Lavaivre et Bertrand, ravagés par le mal du pays, avaient gagné Arêches dans l'après-midi et en étaient revenus trempés jusqu'à la moëlle. Lundi 8 Décembre Il a neigé toute la nuit. Les nombreux camarades sournoisement travaillés par la soupe et les navets (aucune allusion n'est faite ici au pinard, et pour cause...) ont ramené de leurs manœuvres des pyjamas déguisés en stalactites. Et voici enfin le travail : nous déblayons le terrain entre les 2 chalets et nous portons des planches (en morceaux bien entendu) de l'un à l'autre. Le chef Bertrand comme toujours "tire au cul" et se découvre des talents de vitrier insoupçonnés autant que contestables. Nous allumons un brasero dont l'entretien sera 8 jours durant notre unique souci. Après les navets, nous retournons au chantier et tirons des bûches jusqu'au hangar. L'équipe fait du bon travail. Monsieur Charamerde, le guitariste bien connu à Paris, Marseille, Arêches et autres lieux, se spécialise dans le transport de bois à allumettes. Quelques grattins bien tassés terminent la journée. Nous nous couchons... (*) ![]() Mardi 9 Décembre Le travail continue..., il continue ou du moins fait semblant. Les vitres s'élaborent, le sable fond sous la flamme du brasero. A 10 h, nous apprenons du chef Morose qu'il nous faut descendre à Beaufort dépanner le muletier, nous mangeons aussitôt... ou du moins nous faisons semblant. Nous partons, voyage sans histoire... Nous remontons avec des miches. Le délicat Monsieur Charamerde, guitariste bien connu à Marseille, Avignon et autres lieux a des vapeurs, des aigreurs ou des gonflements... Toujours est-il qu'il s'écroule sur son lit... disparaît de notre histoire pour quelques heures. Monsieur Lafèvre lui aussi indisposé disparaît sous des couvertures, quant au chef Vallat, ses 190 cm sont tortillés par des coliques qu'il nous dit être effroyables (pour plus de détails que la discrétion, et il faut le dire, le manque de documentation nous obligent à sceller, consultez notre digne intendant). ![]() Mercredi 10 Décembre Changement de programme, il s'agit de bétonner : nous bétonnons. Monsieur Barbier retrouve son élément et fait preuve d'un zèle intempestif et éphémère. Le sable est passé au tamis par les bons soins de Messieurs Hornilh, Avice et Charamerde (ce dernier, guitariste bien connu à St Guérin, Bandol et autres lieux, se découvre un mal de pied douloureux et diplomatique qui lui interdit, dit-il, toutes sortes de mouvements). Chaux et plâtre sont amenés, un peu d'eau corse l'affaire, le béton est amené par brouette au nouveau chalet. Le soir, le menu est le même, et nous rebétonnons, d'autant mieux , ajoutons-le, que le travail s'organise. L'équipe entoure le brasero, chacun s'accroupit ou s'assied, les mains se tendent au feu, et nous chantons : le vieux chalet, notre chalet, celui de St Guérin où est resté notre cœur, cependant qu'un veilleur surveille le chemin où peut naître à tout instant le fantôme d'un chef... et que Monsieur Desrobert exerce ses talents à sculpter avec amour une petite quille. Le soir tombe, nous rentrons dîner (c'est du moins ce qu'on a prétendu) pour baffrer ici et là, à notre compte personnel (ce fait là est du moins authentique) puis nous coucher... et enfin dormir. Mardi 16 décembre La piqûre fait son effet sur certains ! Aussi tout le monde se repose. L'équipe d'Art Dramatique essaye vainement de répéter son dégagement de dimanche. Le soir, tout le monde, sauf Fouchère encore souffrant, se retrouve autour de la table. Mercredi 17 décembre Pfeiffer enfin réussit à faire répéter sa troupe. Les projets de décoration du chalet passent à l'état de réalisation. Falque, tranquillement, avec ténacité, fend du bois. Une rumeur courre le chalet : il paraît que Baldet se lave tous les jours. Ce n'est qu'une rumeur. On parle beaucoup des préparatifs de Noël. Chez nous des volontaires descendent faire rougir les chantres à Arêches. Bertrand est paraît-il exceptionnel dans le chant grégorien, que ne l'est-il pas dans les autres ! Jeudi 18 décembre Les chefs descendent à Beaufort de très bonne heure, réveillant tout le chalet. Le placide Cirouge lui-même n'en revient pas. L'Art Dramatique répète. Il paraît que Carteron s'en va, Fouchère découvre un béret qui lui va … que c'en est oune gala... Vendredi 19 décembre Les travaux de décoration sont activement poussés, l'allure du réfectoire est nettement joyeuse. De Beaufort, à onze heures du soir, nous arrive notre troupe d'Art Dramatique. Patins, chahuts, gueulantes, voilà le résultat d'une journée de répétition. Monsieur Charavin conserve malgré le froid une attitude de naïve dignité. Pourtant les cordes de sa guitare ne sont pas encore arrivées. Samedi 20 Décembre La décoration avance d'une façon énorme. Monsieur Charavin se dépense sans compter... chose qui n'est pas rare chez lui, vu qu'il est toujours fauché. Le réfectoire est presque terminé, il a vraiment fière allure. La 1ère équipe rentre de Roselend, sale, fatiguée mais rayonnante d'être enfin à St Guérin : son chalet, notre chalet. L'aumônier est venu... messager du Ciel, porté sur ses skis. Malgré ses hautes fonctions, la montée est dure. Remarque : Baldet, pris d'une crise, s'est lavé cet après-midi. Dimanche 21 décembre La deuxième équipe passe sa journée en ablutions. L'aumônier après sa messe nous fait une conférence fort appréciée sur "les femmes", sujet épineux mais dont il écarta les branches sans se piquer les doigts. Le soir l'équipe d'Art Dramatique donna à Beaufort un dégagement qui, sans être un succès éblouissant, est un encouragement pour l'avenir. La nuit passée dans la salle des fêtes ne fut pas désagréable. Arrivée au chalet de 4 polytechniciens en rupture d'équations. ![]() Lundi 22 Décembre Rendez-vous à 9 h ½ à Arêches pour le groupe de St Guérin afin de saluer, à son passage, le général Bergeret en visite au Planey. Dès 9 h ½, les volontaires prennent leurs places et pendant 2 heures vont battre la semelle. Le bon chien Fino, non prévu à la petite cérémonie, se voit relégué au loin de la vue des autorités. Bruit de corne d'auto. Faire Face, des cagoules bleues-vertes et un chapeau mou précédés d'une canne descendent des autos. Il est midi, le général Bergeret commence son inspection. Il paraît que Lemoine préparait l'agriculture en faisant H.E.C., comme quoi le commerce mène à tout à condition d'en sortir. Constatation du général : Carteron a maigri. La revue terminée, le groupe affamé, remonte illico au chalet. Mardi 23 Décembre On prépare le chalet pour Noël. La décoration se poursuit à vive allure. Carteron, et son brillant second Fouchère, s'attaquent à la carte. Le chef Guers rentre le soir après avoir battu toute la Bresse. Il nous apporte deux dindes magnifiques "La Guerre de l'Oie aura t-elle lieu"... Le chef Mollier, après les raids de ces derniers jours ,repart battre la campagne pour les besoins du Réveillon. Mercredi 24 Décembre Fièvre générale au chalet. Des bruits fâcheux circulent. Lavaivre est en panne à Annecy avec le pinard, les dindes ne seront pas cuites, nous manquons de farine. Un repas frugal réuni tout le monde à 8 heures. Départ 10 ½ pour Arêches pour les piétons ; à 11 heures,les skieurs, à la lueur de leur lampe s'élancent sur la route. 25-12-41 Après avoir eu la satisfaction de savoir de la bouche de Lavaivre que le pinard est à Arêches ,Hurrah, le réveillon sera au poil. Quelle descente, mes enfants, au milieu des tyroliennes, des sapins et des culbutes relatives à l'obscurité ! Bertrand souffle tout le monde en lançant un "Minuit chrétien" vigoureux et même harmonieux. La chorale de St Guérin bat de loin les chantres d'Arêches. La messe terminée, les équipes remontent, affamées, au chalet. Avant le réveillon, autour de l'arbre de Noël dréssé devant notre chalet, le chef distribue les cadeaux. Enfin arrive le banquet, immédiatement nous sommes dans l'ambiance, et quelle ambiance mes enfants ! Avant de commencer les hostilités, Blanc et Charavin remettent au chef Guers un siège magnifique de dignité. Inutile de raconter cette soirée qu'au dire de tous est une des plus belles que nous ayons passées. Un simple coup d'œil sur la page suivante vous introduira dans notre atmosphère. Les chants, les cris, les numéros, les histoires se succèdent à un rythme accéléré. Des ………… amis de Pfeiffer, arrivés en retard, ne tardent pas à se mettre dans le mouvement. Weller, une véritable révélation, éclipse tout le monde par un solo d'harmonica absolument formidable. Honilh, ayant voulu matcher le chef Seguin, disparaît un pour un bon moment de la scène en compagnie de Lapierre. A remarquer que Charavin, guitariste bien connu, ne crache pas sur la crème au chocolat, quant à notre chef à tous, tous les espoirs lui sont permis pour les championnats de "Premier biberon". En cas de compétition, il paraît que Fouchère s'y inscrirait volontiers. Et la baffrante dura jusqu'à 8 ½, où un décrassage d'un entrain endiablé conduisit les …………. à leur repère. Puis le chalet tomba dans une douce somnolence. A part les chefs Guers et Seguin, Avice, Charavin, Falcoz et deux Pypos et, mon dieu quel oubli, Martin Lalande, tous les autres ont gagné les pieux. Je me suis laissé dire que Salley avait refusé de la dinde. La journée se passa fort tranquillement ; dans la matinée le chef Guers coiffé d'un chapeau à la Trénet et accompagné de Charavin essaya de secouer les endormis, en vain d'ailleurs. Pour plus de renseignements, le lecteur est prié de se transmettre à la page suivante où notre brillant caricaturiste Lavaivre a illustré de manière définitive cette soirée mémorable. Mais au fait, nous sommes le jour de Noël, Jeudi 25 Décembre Rien à signaler après la bagarre. |
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